AGENDA : les religions exposent leur culte

Le printemps est arrivé. L’occasion d’enfiler petites jupes et lunettes de flambeurs pour aller toiser du célibataire. Pas question de courir les sentiers battus. Draguer dans un lieu de culte ? Le nom s’y prêt(r)e bien mais c’est pécher. La ruse ? Préférer un endroit plus neutre mais non moins saint, grâce aux objets religieux qui y sont exposés. Le picotement de l’interdit, le poids du repentir en moins. L’air de ne pas y toucher en somme.

Premier spot de rencontre : palace pour tous

Versailles n’est pas que le vestige des barons de la haute qui claquaient leur fortune au nez de la plèbe. Il y a aussi du sacré dans cet édifice. Depuis mardi, Jérusalem s’expatrie au palace du sept huit. Au programme, pas n’importe quels trésors. Ceux du Saint Sépulcre. Soit l’église éponyme de Jérusalem qui renferme le tombeau du Christ.

Depuis le Moyen Age, des milliers d’objets précieux ont été recueillis et protégés par les franciscains (ces frangins catholiques nés en Italie sous l’impulsion de François d’Assise). Orfèvrerie sacrée, vêtements sacerdotaux, peintures religieuses, tapisseries, pierres précieuses. Du bling bling en barre, offert entre le 13è et 18è siècle par différents rois pieux. Objectif : donner le plus gros diams pour frimer devant les copains. Résultat, un magot d’une valeur inestimable et surtout inconnu du grand public. C’est la première fois qu’une exposition de cette ampleur a lieu hors les murs de la basilique du Saint-Sépulcre. De quoi envoyer du rêve à l’objet du vôtre.

informations : du 16 avril au 14 juillet dans les salles des Croisades du château de Versailles / Tous les jours sauf le lundi de 9h à 18h30 / Entrée incluse dans le prix d’un billet Passeport ou d’un billet Château.

Basilique du Saint-Sépulcre, site de la crucifixionEglise du Saint-Sépulcre, site de la crucifixion/ Crédits photo/ cc Flickr vincent-t 

Articles en lien avec l’exposition :
http://www.liberation.fr/culture/2013/04/05/saint-sepulcre-tresor-public_894030
http://www.la-croix.com/Actualite/France/Le-Saint-Sepulcre-expose-ses-tresors-a-Versailles-2013-04-15-942626 

Montre moi ton dôme

Autre option : l’Institut du monde arabe. Moins clinquant, plus intello. Et on reste sur le topic Jérusalem. Cette fois, c’est une expo autour du Dôme du rocher dont il est question. (Le troisième lieu saint musulman avec la Mecque et Médine). Possibilité d’admirer des ouvrages et une maquette sur la coupole.

Outre la finesse architecturale du bâtiment, ce lieu est hautement symbolique pour les croyants. Il contient le “Rocher de la Fondation”. Selon l’Islam, c’est de là que Mahomet a rejoint le paradis. Le point final d’un voyage fantastique. Le Prophète serait parti de la Mecque jusqu’à Jérusalmen, sur une monture peu conventionnelle. Un coursier appelé Bouraq, sorte de cheval ailé prêté pour l’occasion par l’archange Gabriel (Jibril en arabe). Une expo qui pourrait vous envoyer au septième ciel.

Dôme du RocherCrédits photo/ cc Fickr vincent-t

Informations : du 2 mai au 1er juin 2013 à l’Institut du monde arabe, Niveau 1 (entrée par le 3ème)

Pour se (dé)brider

Ceux qui visent une rencontre plus spirituelle opteront pour la fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent. Ils pourront admirer les formes généreuses des bouddhas rieurs. 127 objets religieux bouddhistes sont exposés : divinités, mandalas ou bonzes en argent datant du VIè au XIXè siècle, en provenance du Tibet occidental ou du Nord-Est de l’Inde.

Un voyage dans le temps et l’espace qu’on doit au collectionneur Alain Bordier. Depuis 30 ans, il a réuni plus de quatre cents objets. La plupart sont visibles depuis 2009 au “Tibet Museum” de Gruyères, en Suisse mais c’est la première fois qu’ils sont présentés à Paris. Les mystères de l’Orient à portée de main.
128841580_dec5b82220_zBouddha dans le 5ème festival du Tibet à Vincennes – Crédits photo/ cc Fickr Theyuped

informations : exposition “Art sacré du Tibet”, fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent / Collection Alain Bordier / jusqu’au 21 juillet 2013

Le premier musée vaudou d’Europe bientôt à Strasbourg

La ville de Strasbourg accueillera en octobre 2013 un musée d’art vaudou (ou vodou) africain dans un ancien château d’eau réhabilité. Première initiative de la sorte en Europe, elle réunirait environ mille pièces.

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Masques vaudou du musée d’ethnographie de Genève / cc Flickr Visual07

Ce sera le premier musée du genre en Europe. Il réunira un patrimoine qu’on a peu l’habitude d’admirer : des objets appartenant à la culture vaudou. C’est à l’ancien président des brasseries Fischer et Adelshoffen, Marc Arbogast, que l’on doit ce projet. Depuis ses vingt-et-un ans, ce passionné d’Afrique rassemble des trésors vaudou : crânes de prêtres bonoko, autels des ancêtres, fétiches bocio pour obtenir la réalisation d’un voeu, costumes Egungun censés incarnés l’esprit des ancêtres.

Autant d’objets associés à des rites mystérieux qui donnent matière à de nombreuses craintes et fantasmes en Occident. C’est pour casser ces clichés sur la culture vaudou que l’ancien chef d’entreprise a décidé de partager sa collection. Il veut aussi présenter le vaudou comme une religion vivante. Le Bénin la reconnaît d’ailleurs comme une religion d’Etat et l’Afrique de l’Ouest compte 50 millions de pratiquants.

Pour mener à bien son idée, il a acheté un ancien château d’eau classé à l’inventaire des Monuments historiques. Il devrait accueillir le public entre le 15 octobre et le 8 novembre 2013 malgré quelques contre-temps et incertitudes. Impossible d’ouvrir sans une mise aux normes préalables. Des travaux longs et coûteux.

Autre problème, le collectionneur peine également à trouver des financements publics pour soutenir l’ensemble du projet. Résultat, à l’heure actuelle, son centre n’est pas assuré d’obtenir le statut de musée municipal. Pour l’avoir, il faudrait que les pouvoirs publics participent. Au moins un tiers des travaux d’aménagement (entre 800 000 et 850 000 euros) et un tiers des frais de fonctionnement (150 000 euros annuels). Pour anticiper un éventuel refus, il continue à chercher des mécènes et il assure qu’il mettra la main au portefeuille si nécessaire.

En attendant l’ouverture, la plupart des objets sont conservés dans un lieu secret à Strasbourg. Une sélection est tout de même visible jusqu’au 19 mai à la Fundacio la Caixa de Madrid.

Subvention des lieux de culte : « le culturel a remplacé le cultuel »

PaEn France, les collectivités locales peuvent subventionner en partie les lieux de culte. Une possibilité qui pourrait sembler, de prime abord, remettre en cause le principe de séparation de l’Eglise et l’Etat. Pascal Ory, professeur d’histoire contemporaine à la Sorbonne, spécialiste des questions culturelles, décrypte ce phénomène.
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Pascal Ory, crédits photo : cc/Flickr/gunthert

Comment justifier la subvention des lieux de culte par les collectivités locales?

C’est une conception de la laïcité qui suppose que les collectivités locales ont une mission matérielle minimale parce que le lieu de culte a aussi une fonction civile. On subventionne non pas un culte, une pensée religieuse mais un lieu de culte. Par exemple, le grand argument pour justifier l’entretien des cloches par les communes est qu’elles ont une fonction d’horloge. C’est un constat : il ne peut pas y avoir une frontière étanche entre les lieux de culte et l’espace civil. Il y avait déjà une liberté d’interprétation laissée aux collectivités locales dès 1905. A partir de cette date, elles ont pris en charge les lieux de culte existants.

La subvention des cultes ne fait-elle pas courir le risque de mettre un terme au principe de neutralité?

C’est le risque mais en même temps, il était, à mon avis, inclus dans la conception relativement souple de la laïcité à la française. Elle donnait une sorte de statut semi public à des établissements de cultes catholiques, protestants et même juifs, bien avant l’exception de l’Alsace-Moselle. Aujourd’hui, on commence à reconnaître le rôle culturel des établissements de culte musulman. Si certaines tensions peuvent apparaître autour de ces subventions, il s’agit pourtant d’une normalisation.

Il ne faut pas oublier que les pouvoirs publics peuvent subventionner des associations. Evidemment, les associations culturelles sont d’un type particulier puisqu’elles jouent sur le sens des mots culturels et cultuels. En 1905, le concept de culture n’existait pas comme il est établi aujourd’hui. Il était clairement séparé du confessionnel. Aujourd’hui, on a presque la tendance inverse. Le culturel a remplacé le cultuel. C’est l’idée de Jacques Lang selon laquelle il faut reconnaître, éventuellement subventionner, des initiatives qui mettent en valeur telle ou telle culture, même communautaire. On peut donner des aides, qui vont de l’achat d’un terrain jusqu’à la subvention à la construction, ou à l’équipement d’un bâtiment, qui par ailleurs est un lieu de culte. On utilise l’argument culturel. Beaucoup de normes, qui sont culturelles aujourd’hui, auraient été confessionnelles jadis. Si une chapelle romane tombe en ruine, on ne va pas dire qu’on ne l’aide pas au nom de la laïcité. Personne ne discute le sauvetage d’un édifice religieux au titre culturel.

N’est-on pas en train de revoir la notion de laïcité avec l’autorisation de subventions, en la faisant passer d’une laïcité qui réprime les comportements religieux à une laïcité permissive?

Le balancement a toujours exixté. Si on a autorisé l’exception de l’Alsace-Moselle après la guerre c’est qu’on a choisi la tolérance plutôt que l’uniformisation, déjà à cette époque là. Les laïcs stricts voulaient appliquer à l’Alsace-Moselle les lois laïques. Ce sont des rapports de force qui font que la tolérance l’a emporté. Il y a donc des précédents à la subvention des lieux de cultes. Cette tolérance est aussi le fait de la fatigue des deux protagonistes de 1905. La grande référence qu’était l’Eglise catholique s’est affaiblie, le tonus laic également.

Lorsque vous étiez élu local, avez-vous été confronté à une demande de subvention de lieu de culte? Si oui, comment cette expérience s’est-elle déroulée?

Je n’y ai été confronté qu’indirectement. J’étais à la municipalité de Chartres. Aux alentours de l’an 2000, elle était engagée dans l’achat d’un terrain pour la construction d’un lieu de culte musulman. L’argument était de passer par une loi associative. L’association se présentait comme culturelle, d’identité musulmane. Un terrain avait été choisi, sur lequel devait être construit un bâtiment mais la municipalité suivante n’a pas finalisé le projet. C’est vrai qu’il y a eu des tensions dans la rue mais elles n’ont pas touché les élus. Les discussions auraient peut-être été plus vives si le projet était allé plus loin.

Pour aller plus loin, consulter l’article « laïcité : cinq décisions du Conseil d’Etat créent la polémique« .

Les dessous des cathédrales

Samedi soir, Arte rediffuse un reportage sur la révolution architecturale que furent les cathédrales gothiques. En choisissant de focaliser l’enquête autour de cinq édifices : Chartres, Amiens, Noyon, Beauvais et Notre-Dame de Paris, les deux réalisateurs Christine Le Goff et Gary Glassman, présentent les résultats des nouvelles techniques de recherche archéologique sur ces imposants édifices.

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Notre-Dame de Chartres, Crédit photo : Flickr/cc/skywaaker

La réalisatrice, une passionnée d’architecture, a “voulu rendre hommage à l’incroyable savoir-faire et à la passion immense de ces générations appliquées à l’édification de monuments“. Des édifices qui la fascinent parce qu’il : « n’y a aucune cathédrale qui sort du Moyen Âge achevée véritablement, elles ont toutes quelque chose qui leur manque ». Une spécificité entourée de mystères parce que les bâtisseurs ont laissé très peu de documents.

Pour palier ce manque d’information, les chercheurs ont dû reboublé d’ingéniosité. Depuis une vingtaine d’années, ils focalisent leurs études sur les outils et matériaux utilisés. C’est ce nouveau savoir-faire que décrypte le documentaire, avec pour point d’ancrage le nord de la France. Les cinq grands chantiers choisis sont ceux où les nouvelles techniques de recherche sont les plus actives.

Selon La croix, ce documentaire aurait nécessité deux ans de tournage et produit plus de cent heures de rushes. Le résultat est un film d’une heure vingt qui explore les secrets de la révolution gothique sous un angle à la fois scientifique, historique et archéologique.

Arte met aussi à disposition un dossier complet sur le sujet des cathédrâle avec notamment une interview de la réalisatrice Christine Le Goff, des repères historiques, des extraits vidéos et toute une bibliographie pour ceux qui voudraient aller plus loin. Les plus impatients ont même la possibilité de regarder le reportage complet sur Youtube.

Les cathédrales dévoilées (France, 2010, 81mn)
Date de première diffusion : Sam., 23 avr. 2011, 20h40
Date(s) de rediffusion : Samedi, 30 mars 2013, 20h45
Dimanche, 31 mars 2013, 10h25
Mercredi, 3 avril 2013, 09h20
Dimanche, 7 avril 2013, 15h00

Une salle de prière à l’origine de tensions entre les associations musulmanes de Clichy et le maire

A Clichy, dans les Hauts-de-Seine, les relations entre la communauté musulmane et le maire PS de la ville, Gilles Catoire, ne sont pas au beau fixe. Une procédure judiciaire est actuellement en cours pour expulser les musulmans de la salle de leur salle prière provisoire, rue de Foucault.

En 2007, la mairie propose aux associations musulmanes un terrain pour construire une mosquée, rue Valiton.  En attendant que les fonds nécessaires à la construction soient réunis, elle met à disposition une salle, 6, rue Foucault, dans laquelle les fidèles se réunissent pour prier. Problème, six ans plus tard, la construction de la mosquée n’est pas terminée et les musulmans refusent de quitter la rue Foucault tant qu’ils ne pourront pas accéder à leur nouveau lieu de culte.

Gilles Catoire accuse les associations musulmanes

Les deux parties ont du mal à dialoguer. D’un côté le maire affirme que les associations font tout pour retarder la construction, comme on peut le lire sur Le Parisien.fr : “Les associations n’ont jamais été en mesure de nous prouver qu’elles avaient les moyens de faire construire leur mosquée. Il y a deux ans, ils avaient soi-disant un million d’euros, aujourd’hui, ils avancent la somme de 500 000 euros. Et, à chaque permis de construire déposé, il manque des pièces…”. En retardant les travaux du groupe scolaire, la ville pourrait également perdre une partie de son financement Anru (Agence nationale pour la rénovation urbaine).

Les associations musulmanes accusent Gilles Catoire

De l’autre, les associations avancent l’argument inverse. Selon Merzak el-Bekkay, premier vice-président du conseil régional du culte musulman : « La ville a fermé la porte à toute négociation. Et aujourd’hui, le maire essaye de monter les habitants contre nous. C’est un jeu très dangereux ». Il affirme même qu’à «chaque permis de construire déposé, on nous demande de nouvelles pièces. Maintenant, ils exigent une étude archéologique du site! »

L’ouverture prochaine de la nouvelle mosquée n’apaise pas les tensions

Finalement, le terrain a été déplacé rue d’Estienne-d’Orves. C’est la mairie qui a pu acheter le terrain, grâce aux récentes décisions du Conseil d’Etat qui permettent désormais aux collectivités locales de soutenir financièrement un projet s’il comprend à la fois un volet cultuel et culturel. Le centre, qui doit ouvrir ses portes en mai 2013, entrera dans ce cadre. Le rachat des locaux a côuté un million d’euros à la ville et les travaux deux millions. Dans un premier temps, les deux parties du bâtiment, celle dédiée au culte et celle dédiée à la culture, seront respectivement louées à l’association Unité et à la Fedam (Fédération des associations musulmanes de Clichy). A terme, le but est de permettre aux associations de racheter les lieux.

Malgré ce projet, les problèmes persistent. La mairie a même lancé une procédure d’expulsion. Le tribunal de grande instance de Nanterre a rendu, le 24 décembre 2012, une ordonnance qui ordonne l’évacuation des lieux. A l’heure actuelle, les responsables des associations refusent toujours de mettre la clef sous la porte. Elles ont fait appel le 8 janvier et continuent de se réunir chaque vendredi.

La pagode Thiên Minh près de Lyon, un temple qui a su résister à toutes les épreuves

 A flanc de colline, au bord d’une petite route dans un quartier résidentiel, on est étonné de tomber sur un temple d’inspiration chinoise. La Pagode Thiên Minh, près de Lyon, a une l’histoire très particulière. Sa construction tient à la volonté d’une famille vietnamienne expatriée pour cause de guerre, qui a embarqué dans l’aventure tous les sympathisants de la région Rhône-Alpes. Reportage sur le parcours du combattant qui a conduit à la création de cet édifice religieux. Un parcours d’autant plus complexe lorsqu’il s’agit d’une religion minoritaire.

6034367983_f5c033c6b1Une trentaine de personnes partagent un thé et des gâteaux dans la salle d’accueil de la Pagode. Des jeunes, des moins jeunes, aucune personne âgée. Les visages sont détendus.  Le groupe sort d’une séance de méditation animée par le Lama tibétain Lama Seunam Dorje. Elle a rassemblé pratiquants et néophytes, venus par curiosité. Si les bouddhistes lyonnais peuvent aujourd’hui exercer leur culte en toute sérénité, le chemin pour y parvenir n’a pas été sans embûches .

Crédits photo : Flickr/ventdimages (Statue de la mère de la compassion)

Un combat méconnu si l’on n’appartient pas à la communauté à l’origine de la fondation du temple. Ce type d’édifice religieux, sans être rare, ne jalonne pas les rues. La région Rhône-Alpes a par exemple un seul temple de tradition mahayana, une des trois formes du bouddhisme, aussi appelé le “grand véhicule” (voir la vidéo en bas sur la question) : le temple Thiên Min. Un de ses membres les plus actifs est aujourd’hui Vincent Cao, le fils du fondateur de ce lieu, Cao Van Truong. Il raconte l’épopée du projet.

A l’origine du projet : un seul homme

Première étape : trouver le bon terrain

Deuxième étape : lever des fonds

Troisième étape : s’accorder avec le voisinage


La pagode a ouvert pour la première fois ses portes en 1985.

L’incendie de 2006, coup dur pour la communauté bouddhiste

Comment exerciez-vous votre culte après l’incendie?

Vincent Cao : « On n’avait plus de lieu où pratiquer. On était obligés de se réunir dans le jardin, autour de la statue de la mère de la compassion. Quand il pleuvait, on sortait des grands parasols pour se protéger. C’était une période difficile pour les pratiquants mais aussi pour le vénérable. Il a vécu un mois chez moi avant que la mairie nous aide à trouver un appartement pour le reloger. Le temple temple était couvert par une assurance. Une partie de l’argent a été consacré à construire une grande cabine qui pouvait accueillir 150 personnes. A l’intérieur, on a réinstallé un autel. C’est un évènement qui a marqué les esprits de tous ceux qui ont connu cette période ».

La reconstruction du temple a t-elle été aussi compliquée que sa construction?

Vincent Cao : « Aujourd’hui, le bouddhisme est beaucoup plus connu en Occident que dans les années quatre-vingt. On a reçu beaucoup d’aide des autres communautés bouddhistes de la région. Les assurances ont également joué un grand rôle. Une partie nous a aidé à reconstruire le temple ».

La nouvelle pagode provoque l’enthousiasme

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Kim et Stéphy sont deux touristes de passage à Lyon pour le week-end. Les deux soeurs, bouddhistes, en ont profité pour visiter la pagode Thiên Minh. Pour elles, ce temple est très particulier : « Il est plus grand que la majorité des pagodes et vraiment très beau. Il a été construit en hauteur sur une colline. La vue est magnifique. C’est aussi une pagode très riche grâce à toutes les statues et les petits édifices religieux ».

HELP : Le grand véhicule, qu’est-ce que c’est ?

Pagode Thiên Minh, 52 rue de Cuzieu– 69110 Ste Foy-Lès-Lyon

Pilleurs d’église : pourquoi les petites communes ont du mal à protéger leurs trésors

Capture d’écran sur la base de données Palissy de la Vierge de Pitié, volée à La Bastide-de-Sérou

« De temps en temps, je regarde la photo de la piéta. Elle a un sourire magnifique. Ca me brise le coeur de penser qu’elle n’est plus là. C’est toute une partie de l’histoire de la commune qui est partie avec elle ». Pierre Salvat est adjoint au maire de la petite commune La Bastide-de-Sérou dans l’Ariège. Mille habitants, cinq chapelles avec quelques objets remarquables, dont une piéta, classée aux monuments historiques, qui a été volée en 2011.

Capture d’écran sur la base de données Palissy de la Vierge de Pitié, volée à la Bastide-de-Sérou
Même si la moyenne nationale des vols diminue, les églises sont toujours victimes de vols. Depuis la loi 1905 de séparation de l’Eglise et de l’Etat, ce sont les villes qui sont en charge des lieux de cultes construits avant cette date. Des charges souvent pesantes dans le budget des municipalités, déjà miné par les travaux d’entretien nécessaires à la bonne marche de la commune. Dans ce contexte, lever des fonds pour sécuriser les églises est très difficile. Résultat, chaque année, des voleurs profitent de ces failles pour dérober des objets.

Les églises sans surveillance humaine vulnérables aux vols

C’est précisément ce qui s’est passé à La Bastide-de-Sérou. La prêtre en charge de cette paroisse a dix églises à gérer, sans sacristain pour l’aider. Impossible de rester toute la journée à surveiller un seul endroit et pas question de fermer les portes. Le prêtre veut que l’église soit un lieu de recueillement ouvert à tous, explique l’adjoint au maire qui poursuit: «les alentours sont très touristiques, ce serait dommage que les visiteurs ne puissent pas en profiter ».

Revers de la médaille, le 9 novembre 2011, des voleurs ont emporté en pleine journée une piéta en bois peint de la fin du XVè siècle de grande valeur. L’adjoint raconte cet épisode avec de la colère dans la voix : « Le prêtre s’en est aperçu en arrivant le lendemain. La piéta est normalement fixée au mur juste en face de la porte d’entrée. Les malfrats ont dû s’appuyer sur les fonds baptismaux pour la décrocher. La police a été immédiatement prévenue. Elle a fait venir la Direction régionale des affaires culturelles (Drac) de Toulouse qui en a profité pour faire l’inventaire de tous les objets des chapelles environnantes».

Un travail important puisqu’il permet de rentrer ces objets dans des bases de données. Celles-ci permettent ensuite à la police d’utiliser les photos et descriptifs en cas de vol. C’est plus problématique lorsqu’aucun cliché n’est disponible. Par chance, ce n’était pas le cas de la piéta, qui avait été « photographiée sous toutes les coutures », explique Pierre. Pour le moment, l’emplacement de la statue est toujours vide et d’autres objets précieux ont été mis en lieu sûr. « Il y a un ciboire avec une émeraude, je l’ai caché », avoue Pierre «Je suis le seul à connaître son emplacement ».

Une prévention trop coûteuse pour les petites villes

Pour le reste, si certaines statues ont été déplacées, la majorité des choses demeure visible, faute de moyens. Les priorités sont ailleurs. C’est ce qu’indique l’élu : « L’année dernière nous avons été victime d’un terrible orage qui a emporté trois chemins. Nous avons dû les remettre en état sinon les habitants auraient été obligés de faire sept kilomètres en plus pour rejoindre les routes principales. Les travaux ont coûté entre 4000 et 5000 euros, alors vous pensez bien qu’entre installer un système de sécurité dans les chapelles et faire des travaux indispensables à la vie des habitants, la décision a été vite prise ». Résultat, pas de système de sécurité.

Les experts de la Drac avaient conseillé à La Bastide-de-Sérou d’installer des grilles devant les édifices religieux, ce qui pour le moment n’est pas fait. Au ministère de la culture, Judith Kagan, la chef du bureau de la conservation du patrimoine mobilier et instrumental conseille aussi d’autres procédés. Elles vont de la simple lumière qui s’allume lorsqu’une personne s’approche du bâtiment à l’alarme sonore, en passant par les cloches qui se déclenchent si une présence est détectée.

Seules les grandes villes peuvent se permettre d’assumer de telles opérations. A Paris par exemple, la Conservation des oeuvres d’art religieuses et civiles (COARC) explique que suite à de nombreux vols survenus entre 2004 et 2006, un vaste programme de sécurisation mécanique et électronique a été ordonné. Pour des raisons de sécurité, la COARC refuse d’entrer dans les détails mais avance un montant global de 380 000 euros. Des frais hors de portée pour les petites communes. D’autant plus que les habitants non croyant ou simplement non pratiquant ne sont pas vraiment ravis de voir le budget de la commune alloué à des lieux de culte. « A la mairie, certains militants à gauche, considèrent que tout ce qui a un lien avec l’Eglise est de droite et le rejettent précisément pour cette raison », regrette Pierre.

Même quand ce n’est pas le cas, la situation demeure complexe. C’est ce que reconnaît le Père Luc Oswald, en charge de la paroisse de Chilly-Mazarin, dans l’Essonne, près de Paris : «Quand on voit comme les élus se décarcassent, notamment pour rénover le toit de notre église, le vol des tableaux devient anecdotique ». En août 2012, un chemin de croix du 19e siècle a disparu dans l’église Saint-Etienne dont il s’occupe. Il s’agissait d’une série de quatorze tableaux, pourtant sans valeur notoire, représentant des moments particuliers de la Passion du Christ.  A l’heure actuelle, la porte qui avait été fracturée au pied de biche a été changée mais les tableaux, eux, n’ont pas été remplacés.

 

 

La notoriété, gage de sécurité pour le patrimoine des églises

(c) zigazou76 Flickr

(c) zigazou76 Flickr

3 questions à Judith Kagan, chef du bureau de la conservation du patrimoine mobilier et instrumental du ministère de la culture

La moyenne nationale des vols dans les églises catholiques est en baisse constante depuis quelques années. Mieux, le nombre d’objets dérobés à refaire surface tend même à dépasser celui des larcins. Un phénomène décrypté par Judith Kagan, en charge de ces questions au ministère de la culture.

Combien de vols dans les églises ont été recensés en 2012 ?

Les chiffres exacts ne seront pas dévoilés avant fin février mais je peux déjà vous dire que l’année dernière, seulement 93 communes ont été touchées contre 167 en 2011 d’après les renseignements recueillis auprès de la gendarmerie nationale. C’est une belle amélioration quand on pense qu’il y a quelques années on était à 600 vols sur le territoire national. Depuis 2008 on peut estimer que les chiffres ont baissé de 50%. Je parle des monuments protégés au titre des monuments historiques. Pour le reste, en 2012 environ 185 objets mobiliers non protégés ont été volés. Ce sont principalement des sculptures et de l’orfèvrerie culturelle sans intérêt patrimonial majeur. Le vrai point positif, c’est que l’on retrouve de plus en plus d’objets. En octobre 2012, la gendarmerie de Forbach (Moselle) a par exemple retrouvé 150 objets ou fragments d’objets provenant de vols perpétrés en 2011 et 2012 dans une trentaine d’églises d’Alsace et de Lorraine.

Comment expliquez-vous ces bons résultats ?

Il y a deux raisons. Tout d’abord on observe ce qu’on pourrait appeler un transfert de la délinquance vers le vol des métaux. Le cours a récemment augmenté et c’est devenu un marché très lucratif. Pensez à tous les problèmes que connaît la SNCF avec le vol de câbles. D’ailleurs les églises encore touchées sont souvent visées pour leurs calices, bougeoirs,  tous les objets en métaux.

A côté de ce phénomène conjoncturel il y a surtout un vrai effort des pouvoirs publics d’inciter les différents acteurs de la protection du patrimoine à travailler ensemble. On a commencé par le code pénal en 2008. Les sanctions ont été renforcées. Avant, si l’on volait un tableau de maître ou une peinture sans valeur il n’y avait pas de grande différence. Ce n’est plus le cas. On a aussi créé un moteur de recherche qui répertorie les photos de tous les biens volés. Ça permet par exemple aux brocanteurs  de vérifier si les objets qu’ils vendent ne sont pas frauduleux. C’est un mouvement général, tout le monde est mobilisé. La police, la justice, le ministère de la culture travaillent main dans la main. Nos conservateurs font régulièrement des réunions de sensibilisation avec les élus (les mairies sont en charge des églises construites avant 1905) et avec les curés. En 2008, on a créé un guide de sécurité des biens culturels consultable en ligne. Nos conseils vont de la télésurveillance pour les grandes villes jusqu’à la surveillance humaines pour les petites communes. Des protections mécaniques peuvent parfois être très efficaces comme une sirène qui se déclenche ou les cloches qui se mettent à sonner si une présence anormale est détectée. Une simple lumière qui s’allume devant l’église peut dissuader une personne mal intentionnée d’agir.

La médiatisation du phénomène des vols ne risque t-elle pas de donner de mauvaises idées aux voleurs potentiels?

Au contraire, l’effet est dissuasif. C’est une question à laquelle on a évidemment réfléchi et on est arrivés à la conclusion suivante : plus les objets sont connus, mieux c’est. J’ai une anecdote à ce sujet. En 2008 des journalistes m’avaient contactée pour obtenir une autorisation pour tourner un reportage dans l’abbaye de la Trinité de Fécamp, où  le vol d’un sarcophage d’une très grande valeur avait été commis. A la même époque, il y avait une  succession de vols à Paris qui n’étaient dus qu’à une seule personne. En juin 2008 le voleur a été arrêté et on a retrouvé chez lui beaucoup d’objets, dont le fameux sarcophage. Et vous savez quoi ? Il semblerait que le responsable ait vu l’émission et qu’il n’ait pas osé revendre l’objet par peur d’être reconnu. Les villes ne doivent pas hésiter à mettre en avant le patrimoine de leurs églises, comme la ville de Conques dans l’Aveyron. Sur le site web de la commune, on peut voir tous ses trésors. La notoriété est paradoxalement un gage de sécurité car les gens se sentent plus concernés.