Les actes antisémites et antimusulmans en forte hausse

Une « augmentation toujours plus marquée de la méfiance à l’égard des musulmans ». C’est ce que constate le rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), publié le 21 mars à l’occasion de la Journée internationale de lutte contre le racisme.

 

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Capture d’écran CCIF

Les actes antisémites et antimusulmans ont fortement augmenté en 2012. C’est ce que constate le dernier rapport annuel de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). La CNCDH a recensé 177 actes et 437 menaces antisémites, ainsi que 53 actes et 148 menaces islamophobes en 2012. Soit une augmentation de 58% pour les premiers et de 30% pour les seconds par rapport à l’année précédente. Selon Christine Lazerges, qui préside la commission, “les chiffres sont faibles, mais ils ne montrent que la partie visible de l’iceberg.”

Ces deux augmentations ont des causes différentes, selon Christine Lazerges. « Pour l’antisémitisme, les causes sont aujourd’hui essentiellement conjoncturelles », estime-t-elle L’affaire Merah, en mars 2012, et l’attaque d’une supérette casher de Sarcelles (Val-d’Oise), en septembre 2012, auraient nourri l’antisémitisme. ”Cette vraisemblable hausse des actes antisémites restera à confirmer en 2013″, affirme Christine Lazerges.

L’islamophobie, un “phénomène structurel”

 

En revanche, la hausse des actes antimusulmans – pour la troisème année consécutive – est plus préoccupante. « On a affaire à un phénomène beaucoup plus structurel, car nous observons cette augmentation depuis maintenant trois années consécutives”, détaille-t-elle.

55% des personnes interrogées estiment aujourd’hui que les musulmans “forment un groupe à part dans la société”. Soit une hausse de quatre points par rapport à 2011 et de 11 points par rapport à 2009. « Il y a une mauvaise perception de la religion musulmane qui menacerait un modèle social en difficulté et la laïcité comme élément de l’identité française », analyse Emmanuel Rivière, directeur d’opinion de TNS Sofres qui a réalisé une enquête approfondie auprès de 38 personnes pour ce rapport.

Ces indicateurs corroborent les résultats d’une enquête d’opinion de l’institut CSA dévoilée dans le rapport de la CNCDH. Réalisée auprès d’un échantillon de 1 029 personnes du 6 au 12 décembre 2012, elle confirme que les Français ont une vision de plus en plus négative de l’islam. 55 % des personnes interrogées considèrent qu’il « ne faut pas faciliter l’exercice du culte musulman en France » (+ 7 points par rapport 2011).

Les études faisant état d’une montée d’un “sentiment antimusulman” en France se sont multipliées ces derniers mois. Fin janvier, une enquête très largement relayée et commentée de l’Ipsos, publiée par Le Monde, révélait que que 74% des Français jugent l’islam « intolérant et incompatible avec la société française ». Ci-dessous, une infographie publiée par le quotidien du soir qui présente les résultats:

 

Banalisation des actes antimusulmans

 

Plusieurs causes sont avancées pour expliquer cette augmentation. Il y a d’abord des évènements ponctuels: la CNCDH constate néanmoins « l’existence de pics » d’actes hostiles. Dans la foulée de l’affaire Merah, le nombre d’actes antimusulmans a sensiblement augmenté. Les auteurs du rapport observent également un pic en septembre-octobre, “au moment de la diffusion du film et de la parution des caricatures du prophète Mahomet dans Charlie Hebdo”.

Selon la commission, « Internet contribue grandement à cette banalisation ». Mais, précise le CNCDH, « elle s’alimente également de l’instrumentalisation dans le discours politique de certaines thématiques, comme l’immigration et le rapport entre religion et laïcité, ainsi que de certains dérapages et des polémiques qui ont suivi ».

Dans ses propositions, la commission appelle les pouvoirs publics « à trouver les moyens pour lutter contre les préjugés », et ce, « dès la crèche et l’école maternelle ».

 

Pour aller plus loin: le Collectif contre l’islamophobie en France dresse une carte interactive des actes antimusulmans dans l’Hexagone.